Vous pensez que faire rimer « équipage de Barbe Noire » et « concours de cuisine » serait impossible ? Avec pareil ramassis de pirates, la chose serait effectivement irréaliste. Bande de fiers pirates, la seule cuisine qu’ils font c’est cuire de la viande autour d’un feu, rien de bien compliqué ! Et pareil quand ils sont en mer, que Davy Jones bénisse l’invention des fours ! Plus couramment aussi, c’est de la bouffe déjà toute faite qu’ils se content de voler. Nul cuisiner attitré dans ce grand équipage, que pourrait-il bien y faire de toute façon ? Il était inutile de faire le gourmet ou tenter la gastronomie sur ces mers, c’est une perte de temps quand la météo ne permettait pas de répit. Mais, peut-être Barbe Noire allait-il revoir son jugement après ce fameux concours. Une bonne cuisine pouvait, après tout, le sauver de beaucoup d’autres plus mauvaises ! Il pouvait rire et dire que des centaines d’hommes loyaux et sanguinaires l’avait rejoint, que son équipage était le meilleur, qu’il était imbattable ! Mais pour ce qui était de la cuisine… Une infâme matière verte sortie d’on ne sait où grace à Doc Q commençait à griller l’odorat du capitaine. Ce fameux concours pour une poignée de berry commençait rudement bien !

Heureusement, par la technique habile d’Izaya, les trois hommes purent esquiver gracieusement le devoir de gouter à son plat. Puis se succédèrent les hommes qui luttaient pour la récompense. Du poisson qui venait d’être péché, de la viande, c’était la base de leur alimentation, c’était donc normal qu’ils le servent encore et encore. Malgré tout, il y avait des champions (autre que Burgess), des champions qui parvenaient à trop cuire ou pas assez cuire, qui pensaient que les champignons du coin étaient tous comestibles, que n’importe quelle feuille servait d’assaisonnement. Comme juge, Teach était clément. Ayant eu l’habitude dans sa jeunesse de manger pour survivre, il avait toujours la capacité d’ingurgiter des choses qui manquaient de cuisson ou qui étaient couvertes de noir. Ainsi il mangeait ce qu’il était sûr qui soit comestible, même mal préparé. Pour autant, il avait des notions basiques de l’environnement et plus encore il connaissait l’intelligence moyenne des hommes sous ses ordres. Par peur d’empoisonnement, il esquivait tout légume, tout épice qu’il savait provenant de l’ile, il n’était pas fou ! Il en était déjà tombé malade plus jeune, il savait donc à quoi s’attendre.

Le plus drôle pour lui restait d’observer parfois la tête que tirait Taizone mais aussi et surtout Izaya. C’était bien lui le seul juge de son concours, le capitaine n’aimait pas spécialement le raffinement et se contentait très bien de la bidoche qu’on lui servait. En général il mettait 5, parfois 0 quand il ne goutait pas. Il n’était pas à 100% dans ce concours et préférait écouter et voir ce qu’il se passait autour de lui. Le plus intéressant fut d’écouter l’albinos à ses côtés qui lui contait ses aventures. Taegan H. Vitanie, Akainu, son entrainement, le yonkou était curieux et surpris à la fois. Ainsi voulait-il être le plus fort de l’équipage ? Quoi qu’il en soit, il ria grassement lorsqu’il entendit parler de l’amiral en chef de la marine, quel con celui-là ! Le plus amusant était aussi de voir le nouveau lieutenant rire et perdre son sérieux habituel à cause de l’alcool. On aurait dit un enfant qui s’enivre pour la première fois ! Lorsque le barbu put enfin reprendre un peu de sérieux après son fou rire, il interrogea son subordonné.

"- Tu t’es fritté avec un lieutenant ? T’as su l’vaincre facilement ? Zehahaha ! Si tu veux êt’ le plus fort va falloir continuer t’entrainer pour vaincre des plus hauts gradés ! J’t’ai pas fait passer lieutenant pour rien ça m’rassure ! Zehahaha ! Et Akainu, mais qu’est c’qu’il est con ce type ! Sengoku était bien plus dang’reux qu’lui ! Zehahahaha ! Vitanie tiens… Tu la chassais avant qu’on se tape Shanks ? J’savais pas qu’t’avais d’l’histoire avec elle, m’enfin ça a plus grande importance ! Zehahaha !"

En pleine discussion, le concours touchait pourtant à sa fin. Les deux hommes se firent coupés par l’arrivée du dernier plat, un plat tape-à-l’œil. Bourré de couleurs claires, visiblement c’était un truc avec des fruits. Barbe Noire n’était pas porté fruit, il se fichait un peu de ce que c’était mais il mangea son assiette sans broncher quand il entendit les deux avis positifs de ses membres d’équipage. Et il fut agréablement surpris… C’était bon et le goût était très spécial, puisque n’ayant jamais mangé ça auparavant. D’après les critères de l’événement, c’était sans doute le truc qui devait gagner. Le yonkou suivit alors l’avis d’Izaya et émit sa propre critique, parce que c’était bien joli tout ça mais fallait pas déconner ! Y manquait toujours un truc super important que le pirate s’empressa de compenser en se levant et en agrippant une grosse cuisse de viande qui rôtissait prêt du feu. Il invoqua le silence et se retourna théâtralement pour faire une annonce.

"- Les gars ! Le vainqueur de c’concours vient d’être décidé ! C’est Vesp’ qui gagne le blé ! Zehahaha ! Et vous voulez qu’j’vous dise ?! Bordel la prochaine fois, mettez plus de bouffe dans vot’cuisine ! J’ai encore plus la dalle maintenant qu’avant de commencer !"

Sur ces belles paroles, l’édenté prit une choppe des mains d’un de ses hommes, la brandit en l’air et la bue d’une traite en l’honneur de leur tireuse d’élite. La fête repartit alors de plus belle sous les acclamations unanimes de l’équipage entier. Le gros ne tarda pas à reprendre sa place prêt du feu et au moment où il s’assit, il entendit un craquement derrière lui. Sur le coup, il tourna sa tête et fixa les arbres proches de lui, à la recherche d’un mouvement ou d’un autre son qui confirmerait qu’il avait bien entendu quelque chose…

Alors en pleine discussion avec son nouveau lieutenant, l’attention de Barbe Noire s’était reportée sur des buissons alentours. Pratiquement toutes les personnes à ses côtés avaient aussi tiqués sur ce bruit, malgré qu’il ne fût pas très bruyant. Malgré tout, une bonne partie des pirates n’avait pas du tout fait attention, l’alcool en avait déjà enivré trop certains, tandis que d’autres étaient beaucoup trop loin pour avoir entendu quoi que ce soit d’autre que leur compagnons. Le feu était gigantesque, l’équipage également et c’était étrange que du bruit leur parvienne. Les animaux avaient dû certainement décamper à cause du bruit et aussi parce que certains en avaient chassés pour avoir plus de viande. Ca ne pouvait pas non plus être la météo, le vent ne soufflait pas. Restait alors plusieurs possibilités : ça pouvait être d’autres personnes, pirates, marines, révolutionnaires. Etant donné que tout le monde mangeait, personne ne s’occupait de vérifier les alentours…

Bien vite, Vesperine se leva, suivie de Taizone. Ils semblaient tout aussi intrigués que Teach mais, au moins, on pourrait tirer l’histoire au clair rapidement s’ils s’y mettaient à plusieurs. Les deux pirates s’approchèrent alors de l’endroit d’où était venu le bruit jusqu’à ce qu’un autre craquement se fasse entendre. Soudainement, quelque chose sortit d’entre les feuilles d’un buisson, se posant devant la guerrière aux cheveux bleus. Sous la surprise, le barbu s’était relevé aussi, l’un de ses bras dirigé dans leur direction, des ténèbres naissant parmi ses poils, mais la surprise fut encore plus grande lorsque le groupe se rendit compte que ce n’était qu’une chèvre. Un peu soulagé, le capitaine baissa son bras en soupirant mais la seconde suivante, il reçut un projectile en pleine poire, une espèce de ballon qui éclata sur son visage répandant une poudre jaune. La surprise qui se lisait sur son visage fit bientôt place à l’étourdissement. Le yonkou ne put articuler que quelques mots avant de s’écrouler à terre, son ventre amortissant la chute.

"- Merde ! Qu… Que ? …"

Il commença à ronfler alors qu’une voix rauque émana du silence et de la stupéfaction générale. Elle se présenta comme étant l’esprit de l’île, voulant mettre un terme aux ravages qui y prenaient place depuis l’arrivée de toute la clique. Elle laissait deux choix aux intrus : partir ou mourir. S’en suivit un rire long et caverneux qui fit écho sur la prairie. Un bref silence s’installa pour déboucher sur un rire généralisé des hommes en présence : alors qu’une était une centaine, la menace quelconque d’un simple esprit ne les intimidaient pas le moins du monde. Plutôt que d’avoir peur, une majorité se mit rapidement d’accord pour aller s’amuser à aller débusquer le responsable de tout ça. Un premier groupe d’alcooliques survolté se mit en route, brandissant leurs armes mais à leur grande surprise, atteignant l’orée de la forêt, ils sombrèrent dans un trou dissimulé. Un long cri se fit entendre alors que tous restaient les yeux fixé sur ce trou littéralement sorti de nulle part.

Les subordonnés du gros seraient-ils plus prudent à l’avenir ou bien s’en iraient-ils vers leur navire ? C’était à eux d’en décider. L’obèse, quant à lui, ronflait toujours. Peut-être qu’on allait enfin s’occuper de lui, qui sait ?

Affalé sur le sol, l’hideux capitaine dormait toujours à poings fermés. Rien, ni les cris guerriers de son équipage, ni le bruit des armes, ni l’odeur de l’acide et du feu ne parvenait à le réveiller. Touché par des spores soporifiques, il en faudrait plus que ça pour le tirer de sa torpeur. Pourtant, Dieu seul savait ô combien il voulait être réveillé et participer à la fête comme il se doit. Avec lui, il n’aurait fallu que quelques secondes pour rendre ce malheureux bout de terre aride pour ensuite le rendre inhabitable avec des secousses. Etait-ce pour cela que personne n’avait encore daigné tenter de le réveiller ? Peu importe ce qu’il pouvait en penser, pour l’instant il restait pris au piège dans son esprit, les spores l’empêchant de rêver et diffusant d’atroces cauchemars à la place. Comme lui, d’autres hommes avaient rejoint les bras de Morphée, l’alcool ou les chutes dans les trous aidant. De la centaine de pirates, il en restait moins de la moitié lorsque la première couche d’acide et les premiers départs d’incendie commencèrent.

Les animaux apeurés échappaient au contrôle du maitre des lieux, leur instinct de survie prenant le dessus. L’esprit de la forêt ressemblait maintenant à bien peu de choses face au chaos grandissant sur son territoire. Affolé, surpris, il rongeait ses ongles en jurant intérieurement. Ses pièges ne serviraient donc à rien, ni même les spores, grillant dès leur contact avec l’air. Il serait sans doute la dernière âme qui vive sur cette île après le passage d’un tel raz-de-marée. La colère et le dépit lui donnait les larmes aux yeux. Comment ces types pouvaient bien faire ça, étaient-ils tous fous à lier ? Qu’y gagneraient-ils ?! C’était une erreur de provoquer leur fierté mais lui aussi avait été trop présomptueux. Il devait changer de plan et vite s’il voulait s’en sortir… C’est alors qu’il entendit les lourds ronflements du type qui était leur capitaine. Une ampoule s’illumina au-dessus de sa tête et il commença à creuser, utilisant son pouvoir. Aussi rapide qu’une vrille, il se fit n chemin dans la terre, la roche et le calcaire jusqu’à atteindre la surface. Débouchant à côté de l’énorme obèse endormi, il sortit un couteau en hurlant à pleins poumons.

"- C’est fini les conneries maintenant !! Vous êtes tous tarés putain ! Arrêtez tout de suite vos conneries sinon je tranche la gorge de votre foutu capitaine ! Eteignez aussi ce foutu incendie tant qu’on y est ! Et le premier qui s’approche de moi, je charcute l’endormi sans sommation ! Vous êtes prévenus !"

Pensant avoir l’avantage, l’homme soulevait la grosse tête de Teach d’une main et tenait un couteau à sa gorge avec l’autre. Souriant, mais avec quelques gouttes de sueur sur le front, il espérait que cette nouvelle menace suffirait à calmer le jeu. Ces attardés n’allaient quand même pas tenter le diable et essayer de l’attaquer alors qu’ils risquaient de blesser leur capitaine, non ? En tout cas, tout le monde s’était stoppé momentanément. Il ne savait pas comment réagir, ni à quoi il devait s’attendre mais… S’il venait quand même à être attaqué, il n’avait qu’à se laisser tomber dans le trou pour être à l’abri. En donnant un bon coup de pied au gros lard, il serait aussi possible de le garder sous la main, quelle aubaine ! Maintenant que son île, sa forêt était attaquée, il n’allait plus rester à rien faire ! Nerveux, il essayait d’avoir un œil sur toute l’assemblée… Certains pirates étaient derrière lui mais la majeur partie était devant. Il allait falloir être vigilant !

En cette fraiche nuit sur l’île, le brasier déclenché par l’équipage grandissait petit à petit sans que personne ne fasse quelque chose pour l’arrêter. Le vent attisait les flammes et ce qu’il restait de la forêt, déjà découpée par les pirates la journée, allait finir en cendres. Le fameux esprit de la forêt s’était donc montré pour pouvoir essayer d’y mettre un terme mais il ne s’attendit pas à avoir subitement mal à sa main, lâchant le couteau. Maintenant mit en joue par une mitraillette au look douteux, il n’eut pas le temps de réfléchir qu’on venait de réduire ses parties intimes en bouilles. Seul de petits sons aigus parvinrent à sortir de sa bouche, à mesure qu’il s’effondrait sur le sol, de la bave et des larmes sortant de ses orifices. Le pauvre homme vivait là une bien pénible journée… Toute une vie qu’il avait mis patiemment le temps de construire partait maintenant en fumée. Au bord de la perte de conscience, tellement ce coup en traire avait été puissant, il ne sortit de sa torpeur que lorsqu’un espèce de fou s’approcha de lui. Encore obnubilé par sa douleur, il ne comprenait que des bribes de que ce type disait et le peu qu’il en entendit confirma qu’il était taré.

Ce n’est que lorsqu’il vit qu’on le mettait face à face avec l’immonde visage du barbu dégueulasse qu’il comprit ce qu’on allait faire de lui. Insultant l’attardé mental au couteau dans un premier temps, il déglutit bruyamment avant de se débattre en leur suppliant de regarder dans ses poches quand on lui accrocha une bombe dans son dos. Il avait gardé avec lui un liquide extrait d’une fleur à l’odeur si forte qu’elle était destinée à réveiller n’importe qui du plus profond des sommeils. Les pirates s’interrompirent et l’un d’entre eux le fouilla. La fiole fut enfin trouvée et le projet d’embrassade fut abandonné pour son plus grand plaisir. On plaça ensuite le récipient sous le long nez du capitaine et celui-ci ne mit pas plus d’une seconde à se réveiller. Jusqu’alors soulevé par ses hommes, l’odeur infecte avait entrainé le réflexe de s’en éloigner, ses jambes trainantes se mirent alors subitement en marche et il tomba sur les subordonnés derrière lui. S’en suivi une quinte de toux effroyable avant qu’il ne reprenne pleinement conscience et qu’il soit en possession de ses moyens.

Ho putain… Qu’est-ce qu’y s’est passé ? C’était quoi cette odeur, et ce type ?! Et pourquoi y a l’feu ?! C’est vous qui avez foutu le feu ?! Eteignez moi ça direct, vous voulez qu’on s’fasse repérer ou quoi ?! On était ici pour se la couler douce pas pour nous livrer à la marine !! J’veux qu’on m’explique et qu’on m’dise qui c’est qui a eu la bonne idée d’foutre tout ce bordel !

Jetant un coup d’œil général à son auditoire, il remarqua que seul Izaya avait le sourire aux lèvres. C’est donc à lui qu’il demanda des réponses, le regard furieux. Au fil de l’histoire, il comprit peu à peu dans quoi ils avaient mis les pieds même si la fin du récit ne lui avait pas plu du tout. En guise de punition pour cette idée de belle aux bois dormant complètement idiote, il écrasa son poing dans l’estomac d’Izaya. Ça lui apprendra ! Ensuite, il se tourna face au gugusse qui avait trouvé bon de l’endormir. Ce dernier le suppliait depuis plusieurs minutes déjà d’éteindre le feu qui ravageait sa forêt. Pourquoi prenait-il Barbe Noire et son équipage ? Des boyscouts ?! Le yonkou lui posa alors innocemment une question, lui demandant de lui dire si ses pièges avaient été réalisés grâce à un fruit du démon. Ne voyant pas le rapport, l’homme protesta mais Teach lui répondit simplement qu’il n’avait qu’à répondre à la question pour que la verdure qu’il aimait tant soit sauve. « L’esprit de la forêt » se résigna donc à avouer qu’il avait mangé le fruit des tunnels, espérant toujours voir son île sauvée.

Le sourire de l’édenté s’élargit encore un peu plus et il posa finalement ses mains sur le sol. Ses ténèbres se déployèrent en un instant tout autour de lui, couvrant chaque parcelle de terre de l’ile. Il cracha ensuite le nom de sa technique et la végétation sombra alors inexorablement dans la noirceur. Le forban n’avait fait aucune distinction et plus un seul grain d’herbe n’était présent sur ce que l’on pouvait dorénavant appeler un bout de terre. Ne pouvant cacher sa surprise, l’énergumène tomba à genoux, le désespoir clairement ancré sur son visage. Il n’articula alors qu’un mot, pourquoi, et l’obèse lui répondit simplement :

Parc’que j’en ai le pouvoir ! Zehahahaha !! Le capitaine pirate attrapa ensuite l’un de ses pistolets accroché à sa ceinture et tira dans la tête de l’infortuné. Apportez-moi le voile noir ! Alors ? Plus d’odeur bizarre, Izaya ?